février 17, 2020

La semaine dernière, je donnais le top départ des « 7 semaines du management », en vous partageant ma liste de principes de management. On se retrouve donc pour la première étape de ce périple : 1 semaine, 1 principe ! Et aujourd’hui, le principe qui nous intéresse, c’est celui de La confiance. 

La confiance, ça peut être un principe très flou en management. On se dit tous que oui, on fait confiance à nos collaborateurs, oui, on a confiance en son système, en soi, etc. C’est déjà pas mal. Mais en érigeant la confiance au rang de principe, je veux aller plus loin et être plus précis. L’objectif de cet article, c’est donc de décortiquer le principe pour comprendre pourquoi il est si important, et de réfléchir à son application concrète.

Pourquoi la confiance est un bon principe de management ?

La confiance est le seul pouvoir illimité

Il existe 3 types de pouvoir en management : le pouvoir hiérarchique, l’autorité de compétence, et la confiance. 

Le pouvoir hiérarchique, vous l’avez forcément en tant que manager : votre entreprise vous le donne. Mais il dépend uniquement de votre titre. Vous pourriez tout autant être un super manager impliqué, formé, bienveillant, qu’un manager pourri, imbu de lui-même et à côté de la plaque… Ça ne changerait rien. Ça n’est donc pas vraiment un gage de qualité, et en plus, ça n’est pas durable. On vous enlève votre titre et POUF!, toute votre influence s’envole. En plus, ce pouvoir s’use quand vous l’utilisez. Plus vous devez rappeler que c’est vous le patron, moins c’est efficace. 

L’autorité de compétence, c’est le fait d’avoir plus de compétences ou d’expérience que les autres. Le problème de ce pouvoir, c’est qu’il ne tient pas dans le temps, et qu’il limite votre équipe. Si tout votre pouvoir repose sur votre supériorité de compétence, c’est bien simple : vous n’avez plus aucun intérêt à manager vos collaborateurs pour qu’ils progressent, et vous les limiterez. En plus, la compétence profonde que cela nécessite empêche le développement de la pluridisciplinarité. Soyons honnêtes, on n’a pas le temps de devenir expert en tout. Or, le management est déjà un sacré domaine d’expertise à développer. Vous étiez peut-être le meilleur technicien de votre équipe avant de devenir manager. Fatalement, cette compétence-là va se réduire. Mais ce n’est pas grave. C’est même une bonne chose, parce que le pouvoir que vous allez développer, c’est celui de la confiance. 

La confiance, c’est tout l’inverse des 2 premiers pouvoirs. D’abord, elle n’a que faire de la hiérarchie : elle crée des liens qui s’affranchissent de tout pouvoir artificiel. D’autre part, plus on s’en sert, plus elle se développe. Même s’il existe un tout petit risque qu’on en abuse, il est dérisoire. Donc elle ne s’use pas, elle ne fait que croître. En enfin, avoir confiance en vos collaborateurs vous pousse à faire en sorte qu’ils progressent. C’est donc tout bénéf’ : pour les résultats de la boîte, pour vos collaborateurs, et pour vous.

La confiance rapporte plus que la méfiance

Pourtant, la méfiance est souvent notre premier réflexe. Un jour, en marge d’un séminaire, un manager m’a abordé pour me dire grosso modo : « C’est sympa ton speech, mais moi, ça m’a joué des tours, de faire confiance ». Je lui demande : « Ah oui ? Souvent ? ». Et lui de me répondre « Une fois, mais ça m’a calmé. Maintenant, je me méfie ». En revanche, quand je lui ai demandé combien de fois il avait gagné à faire confiance, il ne savait pas me dire. 

Je le comprends, ce manager : c’est insupportable de se faire duper ou abuser. Pourtant, objectivement, la méfiance est toujours la mauvaise voie. Croire qu’on peut tout savoir, tout contrôler, palier tous les abus, c’est un mythe. Vous n’êtes pas tout-puissant… Et essayer de l’être, c’est illusoire et absolument inefficace. Dans une organisation donnée, en moyenne 3 % des personnes sont malhonnêtes. Lorsque vous développez des moyens pour les coincer, vous dépensez beaucoup de temps et d’argent. Ce faisant, vous ennuyez les 97 % de personnes honnêtes, et vous leur envoyez un message de méfiance qui détruit leur confiance. Vous investissez dans le mauvais système, et à terme, ça peut coûter très cher. 

Enfin, la méfiance tue la créativité et l’autonomie. Plus vous donnerez des signes qu’ici, on ne fait pas confiance, moins vos collaborateurs vous donneront d’eux-mêmes. Ils garderont leurs initiatives et leurs bonnes idées pour eux. C’est comme cela que des personnes honnêtes, inventives et débrouillardes à l’extérieur deviennent des moutons bêtes et disciplinés à l’intérieur. Vous ne leur donnez pas de confiance, ils ne vous donnent pas d’intelligence. Vous leur donnez de la confiance, ils vous donnent ce qu’ils ont de meilleur.

La confiance apporte la vitesse

En faisant confiance à vos collaborateurs, vous allez donc développer l’autonomie et réduire les systèmes de contrôle. Mais cela développera également les capacités d’adaptation de tout le monde (vous, vos collègues, vos collaborateurs). Pourquoi ? Parce que si vous voulez pouvoir faire confiance, vous allez devoir donner de l’information : vos collaborateurs devront avoir toutes les clés en main pour régler des situations. Un incident pourra se régler en 5 minutes, sans que vous n’en ayez jamais connaissance, et c’est très bien. 

La confiance implique aussi plus de simplicité : moins de planification, et moins de structure. Elle nécessite moins de niveaux hiérarchiques, et moins de moyens généraux. Je l’ai vérifié 1000 fois. Un logiciel de gestion de projet défaillant sera toujours compensé par une équipe confiante, mais jamais l’inverse. Quand une équipe de projet fonctionne mal, ce n’est pas l’outil de gestion qu’il faut regarder en premier, mais la circulation de l’information, la relation entre les gens. Bref, la confiance qu’ils ont les uns envers les autres !

Comment construire la confiance en management ?

La confiance n’est pas naturelle, on l’a vu dans le paragraphe précédent. Elle se construit. Quand je parle de confiance en séminaire, on me dit parfois : « Moi, je fais confiance, donc je n’interviens pas. J’ai foi en l’Homme ». Mais ce n’est pas suffisant : la confiance, il faut la développer. 

La confiance se construit en donnant du temps

La loi des relations exponentielles nous apprend que pour une équipe de 15 personnes par exemple, il existe 105 relations possibles. C’est ingérable pour un être humain. Nous allons donc naturellement nous orienter vers ceux en lesquels nous avons le plus confiance. Alors, okay, la confiance, ça peut commencer sur un feeling, quelque chose d’inexplicable, qu’on ressent. Mais ensuite, il faut que ça se développe, sinon, ça retombe comme un soufflé. Et puis, parfois, on finit par connaître une super relation avec quelqu’un avec qui on n’avait pas eu un super feeling initialement. L’intuition, ça ne peut donc pas être le seul guide. 

Donc, comment faire pour initier la confiance qui n’existe pas encore, ou pour entretenir celle qui naît avec un collaborateur ? « Donne avant de prendre », ça devrait être le principe de base du manager. Et le meilleur don que vous puissiez faire à vos collaborateurs, c’est celui de votre temps. Alors, pas tout votre temps évidemment, mais du temps régulier. Votre temps, c’est votre plus grande richesse, celle qui conditionne toutes les autres. Pour ça, notre outil phare, si vous ne le connaissez pas encore, c’est le 1 à 1

La confiance se construit en donnant sa confiance

L’autre chose merveilleuse que j’ai découverte en faisant confiance, c’est que c’est une ressource illimitée (contrairement au temps, mais ça, on en parle la semaine prochaine). 

Pourquoi ? Parce que donner sa confiance génère de la confiance. Si vous donnez de la confiance, vous recevrez de la confiance, et vous générerez de la confiance. 

J’adore cet exemple donné par Charles Pépin dans son livre La confiance en soi, une philosophie. Il interviewe un alpiniste connu et lui demande : « Que fais-tu quand un des membres de l’équipe manque de confiance en lui ? ». L’autre lui répond qu’il le met premier de cordée. Parce que le fait qu’on le mette en responsabilité, lui donne confiance en lui-même. En entreprise, c’est pareil. Vous obtiendrez de la confiance en en donnant. C’est en alternant 3 choses que vous construirez la confiance : donner des responsabilités, sécuriser et fêter les réussites. 

Et l’inverse est vrai également : la confiance est détruite par le manque de confiance. L’être humain est hautement adaptable. Si vous le traitez comme quelqu’un en qui on ne peut pas avoir confiance, il deviendra quelqu’un en qui vous ne pourrez pas avoir confiance. 

La confiance se construit en acceptant le risque

Quand vous décidez de faire confiance, vous acceptez deux types de risque :

  • le risque que l’on abuse de votre confiance (mais celui-ci est dérisoire et ne mérite pas qu’on s’investisse contre. Si vous n’êtes pas convaincu, relisez la partie sur la méfiance ;-)) ; 
  • le risque d’erreur de vos collaborateurs.

Or, le droit à l’erreur, c’est un peu mon cheval de bataille. Je crois profondément que ce qui fait un individu, c’est sa capacité à décider. Or, pour passer à la décision, on doit savoir qu’il y a un risque. J’ai à nouveau choisi une citation de Charles Pépin pour illustrer cette idée. Il dit : « Choisir, c’est savoir avant d’agir. Décider, c’est agir avant de savoir ». Il nous indique que la décision est un enseignement. Une fois qu’on a pris une décision, on peut voir ce qu’elle entraîne. C’est très important de comprendre cela. Parce qu’une entreprise où on ne laisse aux gens que la possibilité de faire des choix, n’est pas une entreprise où l’on a confiance. Ce n’est pas une entreprise où l’on accepte le risque. 

Cette définition de la décision, c’est aussi ce qui explique qu’on apprend en se trompant. “On n’apprend jamais aussi bien qu’en corrigeant ses erreurs”. C’est tout l’intérêt de prendre une décision. Bonne ou mauvaise, c’est la meilleure manière de progresser. 

Les fakenews à propos de la confiance

Il y en a 4, et elles représentent souvent des critiques que je reçois concernant le principe de confiance : la faiblesse, la naïveté, l’absence de contrôle, et la soumission au hasard.

Fakenews n° 1 : « Faire confiance, c’est être faible »

Je suis convaincu que c’est le contraire. Faire confiance, c’est avoir la force de lâcher prise. Par contre, cela doit s’accompagner d’une exigence forte sur la probité de votre collaborateur. Que faire quand on se joue de votre confiance ? Sanctionner immédiatement. Et être rancunier si vous ne pouvez pas le faire tout de suite. 

J’ai pris le parti très tôt de faire confiance. Mais j’ai aussi indiqué les limites de ma confiance. On est dans l’entreprise pour faire le bonheur du client, interne ou externe. Chaque fois que j’ai détecté une action qui allait à l’encontre de cela, j’ai prévenu la personne (feedback), et je l’ai fortement sanctionnée quand elle ne respectait pas les autres. 

Fakenews n° 2 : « Faire confiance, c’est être naïf »

Lorsqu’une erreur est commise, je pars toujours du principe de la bonne intention. C’est-à-dire que je pars du principe que la personne n’avait pas de mauvaise intention quand cette erreur a été commise. 

Cela peut paraître naïf, mais c’est pragmatique. Il m’est totalement impossible de deviner les pensées de l’autre. Donc, plutôt que d’argumenter à l’infini sur le fait que la faute était intentionnelle ou pas, je préfère me concentrer sur la résolution du problème et surtout, faire en sorte que la personne modifie son comportement à l’avenir. 

J’appelle cela le principe de la bonne intention (podcast). 

Fakenews n° 3 : « Faire confiance, c’est supprimer tout contrôle »

Une société sans contrôle n’existe pas. Et même lorsque l’on part du principe de confiance, et que l’on lève au maximum tous les systèmes de méfiance opérés par la hiérarchie, il existe toujours un système de contrôle : le contrôle entre pairs.

C’est-à-dire qu’en communiquant au sujet de la confiance accordée, vous envoyez aussi le message que cette confiance ne pourra être préservée et développée que si personne n’en abuse. Aussi, il se met en place un système interne où les personnes s’autorégulent. C’est le système de contrôle le moins coûteux qui soit. 

Fakenews n° 4 : « Faire confiance, c’est se soumettre au hasard »

Ce n’est pas parce qu’on supprime les structures de contrôle, que l’on supprime les fiches de missions, les indicateurs et la stratégie. Bien au contraire, faire confiance nécessite un renforcement et une réorientation de tous ces outils. 

Si vous décidez de faire confiance, vous allez devoir accentuer le Pourquoi, au détriment du Comment. C’est-à-dire que plutôt que de détailler la manière de faire, vous allez donner des objectifs à chacun, en les laissant plus libres sur les modalités d’exécution. Il faut donc que vous soyez clair sur ce que vous attendez de vos collaborateurs, et que vous établissiez des fiches de missions précises. 

Voilà pour mon premier principe. Nous avons pensé Outils du Manager comme un écosystème : tout tient ensemble. Du coup, nos outils et nos Form’actions abondent dans le sens de ce que vous venez de lire et que vous lirez dans les semaines à venir. Les 1 à 1 (de connexion, puis dynamiques) servent à développer la confiance en donnant du temps, Le DISC vous aide à développer votre empathie et votre influence. La délégation vous permet de travailler l’autonomie, etc. Si mes principes vous parlent, je ne peux donc que vous conseiller de faire un tour sur notre catalogue de Form’actions, parce que les principes, c’est bien, mais le plus important… C’est quand même de passer à l’action !

Allez, à la semaine prochaine !

Manon Watine pour ODM